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Une rencontre sous la pluie

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Une averse surprise s’est abattue sur la ville. En un instant, les rues sont devenues lustrées; elles avaient une allure à laquelle nous n’étions plus habitués, car l’été qui s’achevait avait été plein de soleil.

En bourrasque, la pluie déferlait sur le toit du porche de la maison où j’avais pris abris. Des rafales de vent humide me fouettaient le visage; poussés par le vent, des torrents de pluie se déversaient dans mes chaussures. J’étais trempée de la tête aux pieds! Je me suis collée contre la porte et j’ai lissé mes cheveux qui dégoulinaient. Derrière la vitre, un homme lisait. Il détournait discrètement la tête vers moi. Il portait un chandail noir et un pantalon gris. Je le trouvais bel homme. Je le regardais furtivement; de petits regards, justes assez longs, pour constater qu’il avait les tempes grisonnantes ce qui lui donnait une impression de force et d’intelligence. Même si j’avais envie qu’il me laisse entrer la gêne m’empêchait de le regarder directement. Puis, il s’est manifesté et m’a invitée à profiter du vestibule pour me protéger de la pluie.

Quelques jours plus tard, il a sonné à ma porte. À travers la vitre, je l’ai tout de suite reconnu. Après s’être présenté, il m’a expliqué comment il avait su où j’habitais. Depuis qu’il habitait la maison paternelle, il m’avait vue passer sur le trottoir d’en face et il trouvait belle la couleur miel de mes cheveux. Mon appartement était à quelques portes de sa maison, alors il me rapportait la barrette qu’il avait trouvée après l’orage. J’étais séduite par son compliment et en même temps gênée. Je n’ai rien trouvé à dire que merci. J’ai été agréablement surprise de constater qu’il parlait à mon chat. C’était sans doute un homme gentil puisque mon sauvageon de chat acceptait de se laisser toucher sans grogner et sans fuir; il semblait déjà le considérer comme un membre de ma famille d’amis.

– Le peu que je vois de votre intérieur me dit que vous aimez soigner votre environnement. J’aime votre désordre bien organisé.

J’étais impressionnée par son aisance; il était tout à fait à l’aise chez moi.

– Je me préparais un café. Vous en voulez?

– Avec plaisir. Vous vivez seule?

– Non, j’ai une fille de 4 ans qui est présentement à la garderie.

– J’ai vu les livres d’enfant sur l’étagère. Votre chat il a quelque chose de spécial.

– Vous, vous vivez seul?

– Oui et je n’ai pas de chat. Votre café me fait véritablement plaisir.

– Il y a quelques mois que j’habite ici et il me semble ne jamais vous avoir vu.

– Je n’y suis que depuis quelques jours. Mon père est décédé en un clin d’œil, en revenant du travail, sa mallette à la main : un infarctus à seulement 60 ans. Je suis là pour régler la succession.

– Moi aussi je suis dans la maison que je viens d’hériter de la succession de ma mère.

– Belle coïncidence!

Sur le porche de sa maison, je l’avais vu lire des documents, ceux de la succession sans doute. En ce jour d’automne ensoleillé, il portait un veston de velours noir avec des pièces de cuir aux coudes et un jean bleu; il avait fière allure. J’ai remarqué qu’il portait une alliance. J’étais intriguée. Je me disais que c’était trop simple, qu’il montrait le meilleur de lui, mais qu’il devait y avoir un mystère à percer. J’avais envie de le découvrir.

– Je vois que vous avez une alliance?

– Oui. J’ai été marié.

– Vous aussi vous avez une alliance?

– C’est celle de ma mère, mais je ne suis pas mariée.

– Vous avez peur de la déception?

– Non. Simplement que l’amour ne s’est pas présenté.

– Vous, votre conjointe ne vous a pas accompagné?

– Non. Elle m’a abandonné.

– Désolée!

En fuyant mon regard, il a pris une lapée de café.

– Ma femme et ma fille de 15 ans sont mortes dans un accident d’auto.

– Triste! Vous n’êtes pas retombé amoureux?

– Non. Il n’y a pas de femme dans ma vie. Une partie de moi est encore avec elles. Je n’arrive pas à m’abandonner à l’amour. J’occupe mon temps dans le travail. Après cette confidence sur ma vie, vous pouvez m’appeler Étienne. Il avait l’air d’un petit enfant perdu. J’avais envie de le prendre dans mes bras pour le consoler, mais je n’ai pas osé. Le mystère était percé. Il n’y avait que de pénibles vérités. Pas d’histoire macabre! Pas de scandale!

– Vous pouvez m’appeler Marie-Thérèse.

Il a pris son veston et d’un pas posé, il a traversé le corridor et a ouvert la porte. Une fois dehors :

– Merci, Marie-Thérèse pour le café. Et avec une esquisse de sourire et un regard doux.

– Et merci pour l’agréable moment.

– Vous êtes le bienvenu Étienne. Mon chat vous aime!

– Je reviendrai avec plaisir vous dire bonjour avant mon départ. Entre temps si vous avez envie de visiter la maison de mon père, vous êtes la bienvenue aussi.

Je me suis surpris à me dire qu’une véritable fraternité ou complicité était en train de s’installer entre nous trois et que j’aurais aimé être la femme dans sa vie.

Comme quoi il ne faut pas sous-estimer le pouvoir du hasard. Après la pluie le beau temps.

Claudette Rivest

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3 Responses

  1. J’ai connu un couple qui se sont rencontrés sous un parapluie…ils habitaient sur la même rue et prenaient souvent le métro aux mêmes heures…ne s’étaient jamais parlés…une journée au sortir du métro il pleut des cordes..Marie est à la porte du métro hésitante…à sortir…elle entend une voix derrière elle: « Si tu veux on peux partager le parapluie » dit Gabriel (notez que c’est le nom d’un ange!) derrière elle le parapluie ouvert et prêt à servir d’entremetteur! Alors imaginez ce couple existe et ne s’est jamais quitté depuis 30 ans!! Les noms n’ont pas été modifiés et ces personnes existent vraiment, je le jure!!

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