Je n’ai pas d’enfant, mais j’ai deux enfants... - Les Radieuses

Je n’ai pas d’enfant, mais j’ai deux enfants…

Bien oui! Je suis à six mois de ma soixantaine et la vie a fait que je n’ai pas eu d’enfants, et ce, pour plusieurs raisons. Dans la vingtaine, j’étais bien que trop sur la go pour penser à ça et veut veut pas, ma mère répétait souvent que ce n’était pas facile d’avoir des enfants ma p’tite fille… ça reste dans l’subconscient, vous savez.

Il faut dire aussi que mon système reproducteur, ma machine à faire des bébés ne fonctionnait pas bien. La seule chose qui s’est rapprochée d’un bébé dans mon cas, c’est un gros kyste d’endométriose accroché à mon ovaire droit… En un rien de temps, le kyste gros comme une orange était rendu gros comme un pamplemousse et en m’ouvrant, il a eu le culot de se répandre partout, laissant le chirurgien avec beaucoup à faire parce que j’étais pleine d’adhérences… Ma saison de softball fût donc fallballet j’ai eu congé de balayeuse pendant 1 an… Ma pauvre Gaétane en a hérité! Résultat de tout ça, j’étais bien avertie, si je voulais avoir des enfants, fallait passer par les hormones et tout le kit qui pouvaient me donner la joie d’être mère de jumeaux, triplets, quadruplés, quintuplés… NOOOOON! Merci! Pas pour moi! Admettons que j’avais autre chose à faire, trop occupée par ma nouvelle vie jet set de reporter culturel et de recherchiste télé qui aimait voyager avec sa blonde au moins un mois par année… mais aussi, par les frasques de mon seul frère et mes parents qui le sortaient encore de la chnoute en jetant leur dévolu sur leur fille…ce n’est pas facile pantoute d’avoir des enfants ma p’tite fille…

Une bonne dizaine d’années plus tard, ma conjointe Catherine voulait des enfants et a bien failli porter le bébé de mon ami de gars parce que de toute façon, je commençais à me faire plus vieille avec mon seul ovaire gauche endométriosé… La vie a fait que nous nous sommes séparées avant que le projet se concrétise et à bien y penser, je n’étais pas prête et j’aurais probablement eu quelques crises d’anxiété juste à penser que cet enfant pourrait arriver 10 minutes en retard de son couvre-feu à 20 h même s’il avait atteint l’âge de 18 ans! Ah oui! il devait bien y avoir aussi aussi l’annonce choc faite par mon frère de ses abus subis enfant sans qu’on le sache et qui allait le mener à l’automutilation et au désespoir de mes pauvres parents… Je crois sincèrement que mon père chéri en est mort…Ce n’est absolument pas facile d’avoir des enfants ma p’tite fille…

Les années ont passé et à 45 ans, j’ai rencontré ma Lili d’amour, celle qui capote quand elle est en manque de bébés parce que ça fait un bout qu’elle n’a pas vu ses neveux et nièces qu’elle a tant câlinés dès leurs premiers jours. Et la quarantaine qui s’en va vers la cinquantaine n’est peut-être pas le bon choix pour un enfant qu’on aimerait trop pour lui faire vivre notre vieillissement… Et puis finalement, la cinquantaine est arrivée. Stéphane n’en a plus fini de boire, de fumer cigarettes et joints, de faire des gaffes et de tout perdre jusqu’à sa Louise si bonne et si patiente, à finir par en faire des crises d’épilepsie si puissantes et qui lui grillent le cerveau à chaque fois… Et pendant ce temps, maman seule est devenue de plus en plus vieille, dépendante et exigeante avec son rayon de soleil de fille ayant si peur que son fils finisse en prison ou dans la rue… c’est tellement, mais tellement pas facile d’avoir des enfants ma p’tite fille!

Il y a 50 ans, la p’tite fille que j’étais a tellement eu peur de perdre son p’tit frère Stéphane qui s’était sauvé le jour de ses 5 ans pendant 3 heures, qu’elle en a gardé des traces qui lui coûtent encore très cher de psy… Parce qu’à partir de ce jour de fête de 1968, sa maman amplement éduquée à grands coups de peur, lui a inculqué à son tour qu’il fallait qu’elle prenne soin de lui pour ne pas qu’il se perde… tu ne le laisseras pas tomber hein, quand je ne serai plus là?

Stéphane s’est perdu lui-même, par ses choix, Maman. Et ce, malgré tout l’amour que nous lui avons donné et qu’on lui donne encore. Il a failli mourir trois fois à boire sa vie à en perdre sa mémoire à court terme, à répéter parfois trois fois la même phrase, à avoir de la difficulté à écrire lettres et chiffres, à ne plus encoder les informations qu’on lui donne. Lui qui était si brillant! Et surtout, à penser que l’État n’a pas le droit de le garder là où il est retenu depuis 6 mois pour évaluer s’il est apte ou inapte à s’occuper de lui-même et de sa mère avait qui il habitait depuis un an, jusqu’à sa crise quasi fatale d’octobre 2017…

En cette fin du mois de juin 2018, mon frère aura 56 ans et au moment d’écrire ces lignes, je ne sais pas précisément ce que les spécialistes et le juge auront décidé. Mais on nous a bien préparés à l’idée qu’il ne reviendra plus chez ma mère et qu’il sera probablement dans un CHSLD ou autre endroit où il ne sera plus libre de sa vie parce que son jugement disparaît tranquillement. J’aurai alors à prendre la décision de le laisser dans les mains de l’État et de décider si l’état de ma mère qui se dégrade à force de chagrin pour son fils lui permettra encore de vivre dans son appart rempli de tonnes de bibelots, cristal, porcelaine, argenterie, meubles, toiles, photos dont elle ne veut pas se départir…

Non. Je n’ai pas d’enfants, mais j’ai deux enfants. Et je dois vous l’avouer, ce n’est pas facile ma p’tite fille!

Merci Lili d’amour d’être là, je sais si bien que tout cela n’est pas facile pour toi!

Je t’aime mon grand cœur!

Chantal xxx

4 Comments
  1. Belle Chantal, ou est ta place dans tout ça? Tu as fait, et tu fais encore plus que ta grande part! Je ne pense pas que ce serait égoïste de penser un tout petit peu à toi. J’espère que les années à venir seront plus sereines pour toi et pour ta Lili d,amour. xx

  2. Très bel article. Mon conjoint n’a pas eu d’enfant mais à un enfant lui aussi… son grand frère de 67 ans placé en résidence privée , inapte aux biens et à la personne.
    Merci d’avoir partagé avec nous. On se sent moins seule.

  3. Bonjour chantal
    Tres bel article,je comprend tres bien ce que tu vit.j’ai aussi eu a vivre avec un frere qui a du aller en chsld apres un traumatisme crânien
    Bon courage

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