C’est pas des blagues, je veux filer jusqu’à 105! Et qu’est-ce que je veux dire par là? Être en forme jusqu’à 105 ans? Bien évidement, pour avoir au moins un autre 45 ans devant moi pour voir tout ce qui va se passer, même si plein de choses et d’êtres aimés vont dégringoler et disparaître autour de moi…
Je veux aussi filer jusqu’à 105 parce que ça va faire 100 ans que j’aurai eu pour la première fois, ce sentiment si fort de vouloir conduire une auto! Pas une bicyclette avec mes deux tites-rouesde secours, ni une trottinette avec les glinglins trois couleurs qui sortent des poignées et qui revolent au vent, ni une Mobilette vert pomme. Non un charrrr! Une voiture!
J’étais petite et j’aimais les autos, j’adorais quand mes oncles changeaient leur voiture chaque année… Un vrai thrill quand ils se pavanaient avec leur nouveau joujou. Que j’aimais faire mon tour dans la belle Pontiac Parisienne 65′ décapotable, couleur champagne de mon oncle Phil. Lui qui faisait laver et shinerson auto toutes les semaines et qui l’enveloppait d’un drap blanc dans son garage… Ça nous impressionnait rare, mon frère et moi. C’est sans compter le plaisir de voir mon oncle Marcel qui descendait de Québec avec son gros Chrysler Newport 500 bourgogne, convertible comme on disait, en parlant d’une décapotable. Il avait fait installer un lit sur le banc arrière pour son chien Snow, un berger allemand blanc à poils frisés. C’était quelque chose, madame! Que j’aimais monter devant et mettre mon bras sur le bord de la fenêtre baissée, comme mon oncle le faisait. J’avais tellement hâte de faire de même quand j’allais conduire plus tard!
Mes deux oncles s’obstinaient pour dire qu’un des deux était plus GM que l’autre qui était Chrysler. Ce n’était pas le cas de mon père qui était plutôt Ford, qu’il changeait aux cinq ans… Ça me décevait d’attendre si longtemps… Je lui demandais toujours pourquoi il ne changeait pas et me répondait tout simplement qu’il aimait celles qu’il achetait et que ce n’était pas nécessaire de changer chaque année… Mes oncles n’avaient pas de famille à faire vivre, eux… Faut dire que j’étais un peu Ford également, car je suis tombée en amour avec la magnifique Mustang rouge, sortie en 1964. L’année de mes 5 ans! Wow! Que je l’aimais, cette Américaine!
Parlant de mon père que j’adorais et qui était d’une grande bonté et d’une grande sagesse, lui qui était en avant de son temps parce qu’il cuisinait, passait la balayeuse, faisait du lavage et l’épicerie, le beau Maurice avait toutefois un défaut… Il n’aimait pas quand une femme était au volant, car il disait toujours qu’on conduisait mal… Il avait bien tenté, à quelques occasions, d’apprendre les rudiments de la conduite automobile à ma mère dans le parking du Centre d’achats King, mais ça s’était avéré catastrophique, elle si paquet de nerfs… Elle avait peur qu’on monte à bicyclette, imaginez en auto! Vous comprendrez que ça me mettait en beau fusil et que ça m’inquiétait par en dedans, parce que je voulais tellement apprendre à conduire, dès les premières secondes de mes 16 ans…
Ben, non… Maurice n’a pas voulu signer pour que j’apprenne à conduire à 16 ans ni à 17… Moi qui étais pourtant si sage et responsable, j’étais carrément frustrée et indignée! En beau joual vert! Il me trouvait trop jeune… que c’était injuste! Je soupçonne encore ma mère aujourd’hui de l’avoir influencée parce qu’elle avait peur de me voir partir sur la route… J’ai pris mon mal en patience et j’ai attendu mes 18 ans avec résilience, non pas pour arrêter d’avoir des fausses cartes pour aller à la brasserie St-Aubin à St-Laurent, mais parce que j’allais enfin avoir mon permis par moi-même!
Quel incroyable sentiment de liberté que de conduire, d’aller là où on veut! Et quelle inestimable fierté que d’avoir sa première voiture à 19 ans! (oui, mon père a accepté de m’endosser pour mon prêt…). Et vous savez quoi, je me suis acheté mon Américaine, ma Mustang 1976! Et même si elle était brune avec un toit en vinyle beige, je lévitais de bonheur! J’ai presque roulé à 85 miles à l’heure sur l’autoroute avec elle! Wow! Quel feeling! Les road-trips en auto, les blondes, les chums et les amis qu’on trimbale, la vraie vie!
De nos jours, je constate que peu de jeunes désirent apprendre à conduire, surtout dans les grands centres… Des fois je me vois leur dire de prendre le temps de le faire, parce qu’un jour, ils dépendront peut-être des autres pour aller là où ils veulent… comme ma mère qui a eu peur d’apprendre dans le parking du centre d’achats et qui dépend de tous pour se déplacer… Je crois aussi qu’il n’est jamais trop tard pour apprendre. Je lève ici mon chapeau à mon amie-voisine Céline qui prendra le volant pour la première fois au printemps prochain.
Aujourd’hui, à quelques semaines de mes 60 ans, je suis passée de 130 km/h à 105 parce que je veux ménager ma Subaru 2011 qui tapera les 250 000 kilomètres en 2019 pour célébrer mon entrée dans la soixantaine… Un peu comme ma Lili et moi voulons nous ménager aussi! Faut bien continuer à faire rouler son bolide sur deux pattes et faire ses changements d’huile régulièrement pour filer en sécurité sur sa route…
Oui, j’espère que la vie fera en sorte que je puisse avoir toutes mes facultés, de tête comme de corps, pour pouvoir me conduire là où je veux, dans mon auto japonaise et filer à 105! Pourquoi pas? Hein, papa? J’espère que tu continues à veiller sur moi quand je prends la route…
Je t’aime et t’envoie un gros câlin sur ton nuage, mon beau Momo!
Chantal xxx
2 Responses
Félicitations
La détermination au rendez-vous. Mais tu sais que sur les autoroutes ils tolèrent jusqu’à 118, lollllll
Bravo ma bella, beau texte …
Un autre beau texte madame Rousseau!