Le cœur lourd… Pourquoi donc? - Les Radieuses

Le cœur lourd… Pourquoi donc?

Travailler, c’est plaisant quand tu aimes ton travail.  Il y a deux ans, mon conjoint, propriétaire d’une maison de production, a fermé son entreprise. J’y travaillais depuis presque 20 ans, j’aimais mon travail. J’avais 57 ans. Au travail depuis l‘âge de 19 ans, je pouvais donc m’arrêter… un peu.

Est-ce que ça veut dire que je serai à la retraite? Ouin, en quelque sorte.

Bon, je vais prendre l’été pour réfléchir à tout cela. L’été a passé, l’automne et puis l’hiver. J’ai assisté à des cocktails de l’industrie, j’accompagnais quelqu’un. J’ai rencontré plein de gens que je connais depuis des lunes, certains sont devenus de ‘grands patrons’, j’ai manifesté timidement mon intérêt pour faire des contrats sporadiquement. Je regardais tous ces gens qui se faisaient la bise, semblaient heureux de se voir mais…

Je suis rentrée le cœur un peu lourd. Avais-je vraiment envie de retourner dans ce milieu de travail, de faire la bise à des gens qui le font en parlant à quelqu’un d’autre? Je n’ai pas donné suite à mes contacts et eux ne m’ont pas offert de ‘petits’ contrats. J’aurais peut-être aimé, mais…

Poursuivant ma réflexion, moi qui aime tant le ‘monde’, ma gentille coiffeuse Geneviève m’a offert un poste occasionnel de réceptionniste à son salon. Ah, mais pourquoi pas? Oui, oui, certainement. Pourquoi pas? mais…

La première journée, j’étais surprise, je me suis sentie un peu bizarre, j’ai constaté que ce que tu fais dans la vie fait en sorte que l’on ne te traite pas de la même manière. Une clientèle de belles dames, des jeunes, des moins jeunes, des enfants, des hommes. Certains arrivent à la réception et peinent à te regarder.

Au téléphone, certains demandent:

– Qui parle?

– C’est Christine à la réception

– Passez-moi quelqu’un!

– Pardon?

– Ben, passez-moi une telle, je suis sa cliente!

– Ah, vous m’apprenez quelque chose madame, moi je suis sa réceptionniste.

Je m’y suis habituée parce la plupart sont gentilles, que mes jeunes collègues de travail sont adorables et me traitent avec beaucoup d’égard, mais…

Après la première journée, je suis rentrée le cœur un peu lourd, mais… pourquoi? Mon égo? Non, pas moi. Oui, peut-être un peu, pas mal, pourtant.

Est-ce que cette nouvelle vie me convient? Oui, que se passe-t’il alors? Je pense qu’il y a quelque part une ambiguïté sociale avec la retraite. Certains disent qu’ils ne la prendront jamais, d’autres en rêvent. Moi, je pense être un peu ambivalente.

Autour de moi, certaines de mes amies travaillent, sont débordées, elles ont de beaux défis, je les trouve chanceuses parfois…. mais… elles sont aussi fatiguées, ‘brûlées, tannées, mais repoussent le moment de la retraite parce qu’elles aiment au fond leur travail. Je les comprends, mais…

Parfois, lorsque j’en avais marre des diffuseurs trop importants, je me disais ah je suis tannée, j’aimerais mieux vendre des gougounes chez Yellow. La vérité, c’est que j’aimais faire de la télé, j’aimais aussi les gens, mais comme dans tout, il y a parfois des gens un peu, comment dirais-je, condescendants. Qu’à cela ne tienne. J’ai passé de très belles années, j’ai fait de très belles rencontres, j’ai été très privilégiée. C’est peut-être pour cela que parfois, j’ai le cœur lourd.

La vérité, j’aime ma vie de liberté plus que celle de retraitée, comme me l’a souligné la sœur de Guy Corneau un jour : à la retraite, il faut se re-traiter, et c’est bien vrai. Re-traiter ses priorités, ses intérêts, se valoriser autrement. Je remarque que nous sommes plusieurs à se sentir quelqu’un en fonction du travail que l’on fait, mais qu’en est-il de nous comme personne?

Je vous assure que mes ‘grands amis’ du milieu n’ont pas donné signe de vie depuis presque deux ans. Mes amis à moi oui, ma famille aussi.

Mon cœur est de moins en moins lourd, je suis tellement contente de pouvoir dépanner mes filles lorsqu’elles ont besoin, j’adore les journées passées avec mes petits-enfants. J’aime pouvoir partir en vacances quand je veux. J’aime m’intéresser à des nouvelles choses. J’aime travailler occasionnellement, sans pression.  J’aime lire mon journal tout l’avant-midi. J’ai des projets, je caresse le rêve d’écrire plus, des chroniques, des scénarios?

Voilà, je me re-traite, je n’ai pas fermé la porte à des ‘petits’ contrats mais…

Et vous? Vous avez hâte à la retraite? Vous avez peur de la retraite? Lorsqu’on vous demandera votre emploi, vous direz ‘retraitée’, ouch! Mais sachez qu’au fond, en dehors du travail, du pouvoir qui est si enivrant parfois, il y a une autre vie. Celle où l’on fait appel plus souvent à notre cœur et croyez-moi, on en a des choses dans le cœur.

10 Comments
  1. Moi je suis retraitée depuis plus de 3 ans, la première année , on se sent en vacances, on relaxe, et se repose du long trajet que l’on a fait durant notre carrière, l’annee Suivante on commence à regarder les possibilités pour faire du sport et de nouvelles connaissances car nos collègues de travail , on finit par ne plus les voir et notre réseau social se rétrécie, maintenant je sais que je suis à Retraite, car les journées mes semblent moins occupée même si j’en suis une sportive d’hiver. Avec mon conjoint nous faisons du ski alpin, du cardio plei air, malgré tout si l’occasion de peut être travailler une journée semaine m’était offerte , j’accepterais probablement, surtout les mois d’avril, mai et novembre et décembre. Vois tu je serais peut être trop sélective, c’est la Re-traite, on a le choix.

  2. C est tellement vrai Christine. Tu as mis sur papier ce que je ressens depuis 1 an . Difficile de retourner au travail avec des conditions moindres et avec des regards un peu dévalorisants !!

  3. C’est vrai que de choisir de prendre sa retraite est un grand pas à faire ,la première année , on se sent en vacances mais l’année qui suit, on se demande ce que l’on ferait bien de ses journées, à part les repas et le ménage, j’ai de la difficulté à savoir ce que j’aimerais bien faire de mes journées , à part mon conjoint, je n’ai pas d’amies, les collègues de travail ne font plus partis de notre vie, eux , ils travaillent encore. Alors il faut vraiment se re-traiter.

  4. 51 ans. Je ne suis pas encore à la retraite; j’ai le cancer, donc «arrêtée» depuis un bon bout de temps…
    Beaucoup de réflexions se sont imposées.
    Je pense que le cancer ET la retraite sont de bons moments pour revisiter nos valeurs afin d’enligner nos actes dans leurs sens.
    Chistine, j’ai envie de te dire : ça va faire les MAIS, je pense qu’ils t’empêchent d’être bien.
    J’ai travaillé en TV pendant 30 ans, la TV n’est plus trippante comme dans le temps où on pouvait avoir le TEMPS de savourer les bons moments. En TV la jeunesse est un atout et ça fait mal de sentir que les décideurs et diffuseurs semblent ne pas vouloir de nous et que notre âge a l’air d’en être une raison. On n’a plus l’énergie d’avant, c’est un fait difficile à accepter.
    Et on n’a plus de temps à perdre !!!

    Le TEMPS est important, il faut choisir ce qu’on en fait et regarder en avant en vivant le moment présent comme une opportunité.
    J’ai passé ma vie de mère à dire à mes enfants : «On n’est pas ce qu’on dit, on est ce qu’on fait.».
    Alors «let’s do it !» S’il faut ré-enligner nos perceptions des choses et des gens, c’est probablement parce que dans notre vie «active» au travail, beaucoup de choses y sont parce qu’on ne les a pas choisies et qu’on fait avec depuis longtemps.
    C’est l’opportunité de trouver ce qu’il y a d’intéressant dans ce monde, et d’accepter de se lancer dans autres choses. La vie n’est pas statique, elle change, évolue et quand on commence à vieillir, on se rend compte qu’on n’a pas vu certaines choses changer et ça fait mal…
    Oui la perception des autres sera toujours là… ce que tu fais de cette perception et l’espace que tu lui donnes, sont des CHOIX.
    Les gens avec qui tu t’entoures sont des CHOIX.
    Les émotions et les pensées qui viennent sont là. Il faut travailler pour accepter ces émotions, même si elles sont douloureuses afin d’arriver à regarder ailleurs, de décrocher.
    Je travaille encore à accepter le cancer. C’est le cancer qui m’a aidée à arriver à dire ces choses. On a le CHOIX de voir les choses autrement et de laisser l’espoir prendre de la place pour regarder en avant…
    Avec affection…

  5. Mais que j’aurais très bien pu écrire ce billet! Je viens du même milieu quand que toi Christine (je me permets le tutoiement, nous avons travailler à Télémédia, même époque, même gang!), et j’ai pris la grande décision de prendre ma retraite l’an dernier, après 38 ans à aimer ce que je faisais, peut-être un peu-beaucoup-à la folie, très souvent en tout cas! J’ai été dans le même dilemme que toi, me sentant coupable parfois, cherchant à travailler à la pige parfois en offrant mes services, mais… et les « amis » qui te disaient que le contact ne serait pas couper, mais qui ne donnent plus de nouvelles, ne te reviennent pas après les « Il faut s’organiser un souper avant les fêtes… avant Pâques, avant que j’en partes en vacances, à mon retour de vacances, dès que le beau temps revient, avant les vacances d’été… », mais qui ne te reviennent pas. Et là, tu te souviens de leur réaction, leur malaise, quand tu leur as appris LA décision d’une vie: je prends ma retraite. Oui, le cœur peut être lourd parfois, mais la liberté que ma retraite permet, la joie de me lever encore tôt… mais prendre ça relaxe en compagnie de mon café et ma Presse+, ne pas prendre mon petit-déjeuner à mon bureau, plutôt avec une ou des amies, ma famille. Car oui, pour moi aussi, eux, n’ont pas déserté ma vie, même s’il elle est maintenant différente de la plupart d’entre eux. Bonne retraite Christine!

  6. Bonjour Christine,
    ce que je comprends c’est que tu as pris une retraite « obligée « . C’est pourquoi il y a tant de « mais », tu n’étais pas prête! Je vois que tu a beaucoup réfléchis et que maintenant tu en profites ! La phase « re-traiter » ses intérêts, ses priorités est importante pour bien profiter de sa retraite, de cette nouvelle vie .
    Pour ma part, je suis retraitée depuis 6 ans et j’ai fait beaucoup de choses, d’activités et aussi , surtout « prendre le temps de prendre du temps pour …. ».
    J’aime ma retraite comme j’ai aimé ma vie au travail. D’autres défis, du temps pour moi, pour ma famille.

  7. Quel beau texte Christine Fauteux!
    L’écriture est une piste vers votre Ikigaï. Vous connaissez ce concept japonais qui se traduit par »la raison de se lever le matin »?

    Les habitants d’Okinawa au Japon sont célèbres pour leur longévité, leur bonne santé , leur joie de vivre et pour leur alignement sur leur Ikigaï.
    C’est possible de re-traiter si vie en trouvant son Ikigaï pour ainsi amplifier sa zone d’excellence et de brillance et de retrouver son coeur léger.

    A 55 ans, mon Ikigaï à moi est d’accompagner les gens à trouver ce qui leur ferait plaisir de faire pour les prochains 50 ans!
    https://www.hoowow.coach/trouvez-son-ikigai-cest-trouver-sa-raison-detre/

  8. Christine, tu es mon idole! Je suis à la retraite depuis environ 6 ans car dans mon cas je n’ai comme jamais pris « La » décision de prendre ma retraite. Ça s’est fait de façon assez bizarre. J’ai laissé mon poste à l’hôpital pour travailler de la maison (ce que j’ai adoré) et 2 ans plus tard, le gouvernement a changé les règles dans mon milieu donc, plus d’agences dans les hôpitaux, plus de travail pour moi. J’aimais tellement ça, je gérais mon horaire. Je travaillais et j’étais libre également et du jour au lendemain je suis devenue « retraitée »! La façon d’être retraitée est différente pour chacun(e) d’entre nous mais en général la réalité est semblable, plus de travail . Moi, je me suis soudainement sentie inutile dans la société et inquiète de ce que j’allais devenir et comment être heureuse maintenant, n’ayant plus de collègues de travail que je çroyais être toutes des amies……. les vraies amies sont encore dans ma vie, les collègues ont continué leur chemin. Je me suis re-traitée tranquillement et aujourd’hui, je profite de ma vie. Toi, ta route est différente et dans un sens semblable à la mienne. Une chose est certaine, tu as toute une feuille de route et tu mérites de profiter de cette liberté.
    J’ai tellement hâte lire ton premier livre ou ton premier scénario. Xx

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