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Geneviève St-Germain : Incandescente et indomptable

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À 65 ans, celle qui a occupé une tribune enviable dans nos médias pendant plus de 25 ans n’a pas changé. Geneviève St-Germain parle fort, rit fort, a des opinions et brasse encore la cage. Je l’avoue, je l’aime et je l’ai toujours aimée! La première fois que je l’ai vue, c’était Aux copines d’abord. Elle était tout simplement flamboyante et enthousiasmante. Quand je lui dis, elle rit. «Bah, tu sais…»

Grande gueule, assumée, féministe, elle aime le bon vin, la bonne bouffe et les chaussures. Beaucoup. Et ça, ça me parle beaucoup. Prendre de ses nouvelles a été intimidant, au départ, puis s’est avéré un pur moment de bonheur.

Vous avez été pour moi une source d’inspiration parce que vous étiez très affirmée, très assumée. Dans votre livre, vous dites «J’aimerais ça être celle qui ne fait plus peur». Est-ce que cette image forte vous a nui?

«Peut-être, mais, en même temps, j’ai grandi comme ça. Enfant, ado, au cégep, j’ai toujours dit ce que je pensais. Mes parents nous ont initiés à une assez grande liberté de parole à la maison et j’ai continué, mais, visiblement, ce n’est pas tout le monde qui était habitué à ça. Je me suis souvent fait dire par des recherchistes que les patrons avaient peur de m’engager à cause de ma liberté de parole. Voyons! Je n’ai jamais mangé personne ni même eu la volonté de le faire!»

Ce n’était donc pas un personnage taillé pour la télé!

Elle s’esclaffe de rire : «Du tout! Je ne suis pas douée pour jouer ou pour mentir ni pour faire semblant!»

Vous avez grandi dans quel genre de famille?

«Ma mère était professeure, mon père était journaliste. Chez nous, ça débattait, ça parlait trop… De là vient mon côté “attaque-moi pas verbalement parce que c’est sûr que je vais répondre”. Mais, vous savez, je ne suis pas tout le temps dans l’opinion et je n’ai pas d’opinions sur tout!»

Est-ce que ça vous manque d’avoir une tribune pour aborder des sujets qui brassent plus?

«Bien sûr! Mais je pense que je suis devenue trop vieille pour faire de la télé. Ce qu’on propose aux gens en général, particulièrement aux femmes, ce n’est que de la cuisine, de la décoration, de la rénovation de maisons… Il n’y a plus beaucoup de place pour l’opinion. Je trouve qu’il manque de vérité, d’intégrité. J’aimerais voir d’autres gens que ceux de la colonie artistique. Par ailleurs, pourquoi on ne voit pas les femmes de 55, 60, 65 ans à la télé? On ne les voit pas et on ne les entend pas alors qu’on aurait tellement de choses à dire! En plus, ce sont ces femmes qui la regardent! Si on me proposait un show qui me ressemble, j’irais d’un bon pas, je serais bien contente, c’est certain. Mais, ce n’est pas arrivé, et je doute que ça arrive.» 

Pourquoi?

«Les diffuseurs sont plus frileux, il ne faut pas que ça fasse de vagues et, de nos jours, ça ne prend pas grand-chose pour que ça en fasse! Avec Les copines d’abord, on avait une liberté hallucinante. Jamais personne ne venait nous dire “Tu n’aurais pas dû dire ça”. C’était souvent un peu échevelé, survolté, mais on avait une grande liberté. C’était très écouté, on nous reconnaissait dans la rue, on nous arrêtait pour parler. Je pense que c’était parce qu’on ne jouait pas de rôles, on était nous-mêmes. Les gens s’identifient à nous, visiblement.»

Des fois, je me dis, que je suis une vieille emmerdeuse. Ça m’arrive de voir une personne à la télé et de me dire que je ne m’habillerais même pas comme ça pour faire mon ménage! C’est dans ce sens-là que je me sens dépassée.

Est-ce que vous vous demandez parfois pourquoi vous avez perdu votre place dans les médias?

«Si tu savais comment je me suis posé la question pendant des années! J’en ai fait une dépression. Quand ça s’est arrêté, tout s’est arrêté. La radio, la télé. Pourtant, je n’étais pas du genre à faire des crises de folie, à avoir des exigences exorbitantes…

J’ai fait une recherche exhaustive personnellement. Je pense que je n’étais pas trop mauvaise, alors pourquoi ça n’a pas fonctionné? C’est peut-être seulement mon âme qui ne voulait pas y aller. Ça semble ésotérique, mais c’est la seule piste que j’ai! »

Vous avez dit: «Socialement, mon comportement n’était pas le bienvenu, surtout parce que j’étais une femme». Est-ce que vous sentiez que le fait d’être une femme qui s’exprimait librement, qui était bien dans son corps et dans sa tête, dérangeait?

«Oui, beaucoup. Je pense que je n’avais pas mesuré à quel point tout ce que je disais pouvait être retenu contre moi. Je n’ai jamais été dans des rapports de séduction non plus. Je n’avais pas besoin de séduire puisque j’étais capable de dire. On m’a également reproché de n’avoir “jamais été domptée”. Domptée? Lève-toi de bonne heure mon ami, si tu veux y arriver!»

Vous n’avez pas eu d’enfant alors qu’on pourrait croire que vous êtes très maternelle. En avez-vous déjà voulu?

«C’est vrai que j’aime cuisiner, recevoir… Tu sais, les gens ne sont pas monolithiques, ils n’ont pas juste une case. Comme j’ai toujours dit, on peut être féministe à fond et faire la cuisine, être affectueuse avec son mari, tout ça n’est pas incompatible.

On m’a souvent dit que je ferais une bonne mère, mais je n’ai simplement pas eu d’enfant parce que je n’en voulais pas! Dès l’âge de 12 ans, j’étais certaine que je n’en voulais pas. Ce que je voyais dans la maternité, c’était la privation de liberté, qu’à la seconde où tu mets un enfant au monde, tu n’es plus jamais libre. J’aurais été une mère poule, une mère ultra-protectrice. Ça n’aurait pas été bon pour l’enfant, je pense. J’aurais été facilement énervée.» 

Est-ce que votre rapport au corps a changé avec l’âge?

«Moi, j’ai été ronde, je suis encore ronde et ça m’a beaucoup emmerdée. Ça a toujours été une préoccupation. C’est quelque chose qui m’a toujours fatiguée. J’ai lutté, je n’ai pas lutté, j’ai un peu lutté. Moi, les bienfaits d’être ronde, je ne les vois pas. J’ai vécu avec, c’est une partie de qui je suis, mais ce n’est pas une chose à laquelle je pense tous les jours et il n’y a pas de paix avec mon corps qui se fera avec le temps.»

J’ai également fait un AVC au début de la pandémie. Je suis relativement chanceuse puisque je n’ai pas eu de séquelles, ou si peu. Donc ça aussi, ça m’a donné plus conscience de ma fragilité.

J’ai tellement aimé votre livre Mon âge est à inventer sorti en 2016, livre que toutes nos lectrices adoreraient, j’en suis certaine. Aura-t-on la chance de vous lire bientôt?

«J’ai deux livres en préparation. J’ai toutes mes notes, j’ai toutes mes affaires, tout est prêt. Il ne me reste qu’à sortir ma filière et à me remettre à écrire…»

Et on a si hâte de renouer avec l’autrice qui a un sens du punch peu commun. Geneviève St-Germain a du chien, du mordant et une grande élégance qui se traduit jusque dans son écriture. Nous attendrons donc son prochain livre (ou un retour à la télé, qui sait!) avec impatience.

Et juste avant de raccrocher, un dernier : «J’espère que je ne vous ai pas saoulée avec mes propos!» Je ris.

Décidément, je veux être son amie.

Envie de lire Geneviève St-Germain? Vous pouvez commander son livre Mon âge est à inventer que Kathia a adoré!

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