Vous avez le goût de donner au suivant, vous avez maintenant un peu de temps libre, qu’est-ce qui vous vient à l’esprit? Le bénévolat, bien entendu.
Bénévolat, ouin, ça fait vieille madame qui n’a rien à faire, celle si gentille qui nous dirige lorsqu’on va dans une clinique pour recevoir un vaccin; je pense au bon monsieur qui nous donne un beigne lorsqu’on va donner du sang. Cette description est bien péjorative, je sais; je sais surtout qu’il n’en est rien.
Alors que je travaillais encore à temps plein, il y a quelques années, je voulais absolument aller donner de mon temps pour bercer les petits bébés malades à l’Hôpital Ste-Justine. Après avoir rempli les documents, fait la formation, me voilà bénévole à l’Hôpital Ste-Justine. Enfin, je vais pouvoir donner du bon temps à ces petits bébés ou enfants malades et ainsi libérer le personnel et les parents qui ne peuvent être là en tout temps.
Première journée, j’enfile mon petit costume de bénévole, bon, un premier petit choc, ce n’est pas chic, chic. Moi qui aime tant les beaux vêtements. Pas grave, me dis-je, voyons, ne sois pas si superficielle.
La personne responsable des bénévoles me dit : « Aujourd’hui vous êtes au rez-de-chaussée et vous donnerez les tickets aux patients qui viennent pour des radiographies, des échographies et cie ». Bon d’accord, où sont les petits bébés, me dis-je? Me voilà debout près d’une machine distributrice de tickets et je dois diriger les gens, par ici, par-là, et ce, sans connaître le moindre recoin de l’hôpital et, ah oui, j’oubliais, durant quatre heures consécutives. Bon, décidément, c’était la journée de l’humilité et vous savez quoi? C’est bon pour l’ego; on se dit parfois, moi je n’ai pas d’orgueil, il n’y a pas de sot métier… Oh attention, je vous assure que ce n’est pas vrai.
Premièrement, ce travail n’avait rien de valorisant, deuxièmement les gens n’étaient pas très gentils ni polis, du moins certains d’entre eux, et que dire du regard du personnel face à la bénévole, presque méprisant.
Bon, je n’allais pas me laisser abattre pour si peu. J’y suis retournée et cette fois, j’ai pu bercer un bébé d’à peine quatre mois aux soins palliatifs; cette fois-là, ce n’était plus mon ego, mais mon cœur qui était mal en point. Quelle leçon! À l’intérieur de ces murs, on dirait un huis clos, assise à regarder ce petit bébé tout innocent, branché de la tête aux pieds, plus rien n’existait.
Je ne peux décrire ce sentiment et tout ce qui m’a traversé l’esprit durant ces quatre heures et la satisfaction que j’ai éprouvée lorsque finalement ce petit bébé s’est laissé aller. Je le sentais respirer plus doucement, il devenait tout mou, il se laissait aller entre mes mains sans même me connaître.
Encore aujourd’hui, malgré la douleur que je ressentais de voir ce petit bébé malade, je me disais que si j’avais pu adoucir sa vie durant ces quelques heures, c’était mission accomplie. Je savais que probablement la semaine suivante ce petit être aurait sans doute quitté ce monde après avoir fait une si courte escale sur cette terre et que ce court passage en fut un de douleur. Il n’y a rien de mieux que de côtoyer la mort pour apprécier la vie.
Je fais maintenant du bénévolat à la bibliothèque à l’école de mes petits-enfants. C’est tellement mignon de les voir se choisir des livres, la curiosité dans le regard, la spontanéité de l’enfant qui d’emblée, en quelques secondes, te raconte que ses parents viennent de se séparer, et que, bien désespéré, il m’explique que son livre est chez papa et qu’il n’a pu le rapporter. Oui, c’est une réalité, mais moi, je me sens utile en le rassurant, en lui disant qu’il pouvait le rapporter la semaine suivante.
L’entendre me dire : « Merci madame Christine » me fait du bien à moi. Là encore, je dois avouer qu’être bénévole n’est pas nécessairement synonyme de bienveillance et de gentillesse. Comme responsable de la bibliothèque, je me retrouve avec des courriels pour le moins déstabilisants qui me font un peu perdre mes illusions. Il faut se rappeler que derrière le geste, il y a l’humain, celui hélas qui ne rate pas une occasion de rabattre l’autre.
Mais comme je suis devenue la bonne vieille madame gentille qui fait du bénévolat, j’essaie de prendre cela avec un peu d’humour, me disant qu’il ne faut pas que je perde de vue mon objectif : aider.
Alors, je vous le conseille fortement, non pas pour remplir vos journées, mais votre cœur.
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2 Responses
Pour une dernière, tu es tombée pile sur ce qui ne semble pas une de nos priorités. Pourtant, j’y ai pensé moi-aussi…donner du répi aux parents qui ont des enfants handicapés. Mais le transport ma restreint à le faire.
Belle chronique qui pourra faire réfléchir plus d’un.
Céline
À ma connaissance, tu as toujours été affable, bonne envers autrui, généreuse de ton temps, de ton amour, et tout et tout. Bravo Christine! ♥️????