Lectures certifiées bio - Les Radieuses

Lectures certifiées bio

Trois titres à saveur biologique, à commencer par celle d’un jeunot, Simon Boulerice. À son âge, on ne s’imagine pas d’emblée écrire sur sa propre vie, mais « Pleurer au fond des mascottes » est un polaroïd de son enfance, de ses débuts de comédien de théâtre, de son empreinte déjà déposée sur les médias. Suis de près une doyenne, bien connue pour son franc-parler, Jocelyne Cazin, une précieuse Radieuse. S’ajoute une autre illustre figure, le (bon) docteur Julien. Un nom tellement connu que je vous mets au défi de lui donner un prénom! Terminons avec une cerise sur ce sundae, pas cent pour cent bio, mais à forte saveur de vie : « Projet P » où quinze femmes sont invitées à parler du pénis. Ça sonne un peu spécial et, n’en doutez pas, ce l’est!

Pleurer au fond des mascottes de Simon BoulericeÉditions Québec Amérique

Simon Boulerice a le tour de parler de lui à la troisième personne. Doté d’une implacable lucidité, il se regarde vivre comme un personnage de la commedia dell’arte, improvisant sa vie comme s’il était sur scène. Le titre accrocheur Pleurer au fond des mascottes n’a pas été choisi pour attirer l’œil du lecteur et interroger la méninge, Simon Boulerice a incarné son lot de « vraies » mascottes, assez pour nous confier des anecdotes rigolotes. En plus du regard acéré posé sur ces muettes et gigantesques poupées articulées, simultanément, il en jette un sur sa vie d’étudiant en théâtre. Les deux se rejoignent dans une vie de jeune qui tente de percer dans le milieu artistique. On comprend que la mascotte pourrait pleurer à chaudes larmes, on ne verrait que son immuable mimique, ce qui a marqué l’étudiant atrocement timide qu’il était. C’est le point de départ de son édifiant palabre sur les joies du clown triste. Saviez-vous que l’on peut se camoufler à merveille derrière un sourire à tout crin? L’auteur, ludique par toutes les fibres de son être, danse sa vie et nourrit son sourire qui deviendra sa marque de commerce. Arrivez-vous à vous représenter un Simon Boulerice triste, sérieux, désespéré? J’ai essayé et je me frappe toujours à son immuable sourire. Vous l’aimez beaucoup ou vous voulez apprendre à le connaître? Voici une bio réjouissante, dansante, bondissante qui va sonder les nids sombres d’où naît un rire. Et du coup, peut-être apprendrez-vous pourquoi cet auteur est si prolifique.

Ma véritable identité de Jocelyne CazinÉditions Libre Expression

J’ai opté pour cette biographie, irrésistiblement, je dirais. En ces temps pandémiques où notre fragilité refait surface, l’attrait vers une femme dégageant force et détermination s’est fait sentir. Au départ, j’ai été dérangé de constater que la force ne prenait pas des allures lisses et stables, réalisant que le début du parcours de Jocelyne Cazin va dans tous les sens. Dérangée par la bête butineuse, passant du coq à l’âne, j’attendais que l’on m’invite à sonder les raisons de ces agissements impulsifs à répétition. Je cherchais un sens à sa vie, comme l’autrice l’a elle-même cherché. À l’approche de la maturité, le propos prend de l’ampleur, j’ai alors commencé à m’attacher au personnage loin d’être ennuyant. Bien malheureux est celui qui lirait la biographie d’une personne qu’il n’aime pas! Je me suis donc allongée à même ses lignes révélatrices et j’ai commencé à savourer le cœur du sujet.

Les personnes colorées ayant un caractère bien trempé sont rarement faciles à suivre. J’avais hâte de connaître sa véritable identité, si bien annoncée par le titre. Lorsque l’on parle d’identité, assez souvent on fait allusion à la sexualité, ça sentait les secrets d’alcôve. Eh bien, oui, il y en a, et à ce titre, j’irais jusqu’à affirmer qu’à partir du moment où la table est mise (ou le lit), l’autrice se détend. Elle tenait à mettre les pendules à l’heure, mais ce faisant ne voulait surtout pas être étiqueté. Elle réussit à nuancer, ce qui éveillera l’intérêt des personnes qui n’avancent pas de cliché en cliché dans la vie. Cette femme qui a déjoué les apparences pour, parfois, y débusquer le plus exécrable de l’être humain est restée une personne positive, ce qui est tout à son honneur. Ce que je retiens par-dessus tout de l’œuvre est la force de travail de cette femme qui a dédié sa vie au journalisme, allant même jusqu’à se perdre dans les affres de son indéfectible dévouement. L’excès est un ennemi à surveiller de près chez les passionnées qui se battent pour défendre leurs principes. J’espérais rencontrer une femme de caractère, j’ai fait la connaissance d’une battante, d’une féministe, et avant tout, une femme de cœur.

Une vie comme une course à obstacles de Gilles Julien – Éditions Libre Expression

Depuis longtemps, je me demandais ce que fait concrètement le docteur Julien pour être aussi connu et glorifié. Dans cette biographie, qui n’en est pas vraiment une, j’ai rencontré un homme modeste, discret, humble, qualités qui décrivent généralement les grands hommes. Quoi de plus normal que vouloir connaître plus intimement un homme grandi par sa cause? Un peu comme le spectateur devant un tour de magie, je voulais connaître son truc. De quelle chair est fait un homme qui dédie sa vie entière à une cause? Est-ce que ces hommes-là négligent leur vie privée? Voilà la teneur de mes questions et de mes attentes. J’ai cueilli certaines réponses, mais je suis toujours admirative devant le tour de magie sans savoir comment l’exécuter! Les besoins criants des enfants ont aussi gardé une part de mystère. On retrouve peu d’anecdotes dans cette œuvre qui se présente plus comme une riche réflexion à cœur ouvert. Encore une fois, le docteur Julien place sa mission devant lui, alors tant pis pour qui voulait rencontrer l’homme derrière elle. Son bilan est esquissé, sa prise de position claire et assumée, ses solutions fermes et simples. Nous sommes en face du docteur Julien, pas en face de Gilles. Aviez-vous remarqué? Docteur Julien porte le prénom Gilles, ce que peu remarquent. Cela met en évidence, à mon avis, que le (bon) docteur Julien se définit plus par son travail social que par sa vie privée. Ce récit à saveur biologique nous apprend tout de même des informations sur sa vie personnelle, lesquelles on savoure pour leur rareté. Il y a également une part de mea culpa dans son bilan des dernières années, l’homme ayant eu matière à réflexion devant des pépins importants survenus dans l’organisation. Faire plus attention aux gens qui travaillent auprès des jeunes s’avère aussi une manière de prendre soin des jeunes est une de ses plus retentissantes conclusions. Autre de ses constats : on ne consulte pas suffisamment les enfants eux-mêmes pour trouver des solutions à leurs problèmes. Et couronnant le tout, la communauté détient diverses solutions et il faut, plus que jamais, arrimer les divers organismes qui travaillent encore trop dans des vases clos.

Vous voulez connaître Gilles? Armez-vous d’une loupe grossissante (!), vous voulez connaître le (bon) docteur Julien, et vous êtes à la bonne place. Un livre qui fait du bien, autant que le protagoniste en fait.

Projet P – Quinze femmes parlent de pénis – direction : Karine Glorieux – Québec-Amérique

Je commence ainsi : verriez-vous, l’inverse, quinze hommes parlent de vagin? Ça sonne plus spécial, il me semble. En tout cas, j’aimerais beaucoup que l’on ose un tel livre, j’irais confronter si l’inverse est vrai : plus on veut parler de pénis et plus on parle de vagin. Les femmes sont certainement impressionnées par l’appareillage masculin, particulièrement leur faculté à pisser sans être obligé, par exemple, de s’accroupir dans les buissons. Au moins trois nouvellistes laissent pointer leur jalousie! Comment la femme peut-elle nous entretenir de ce qu’elle ne possède pas? La réponse : en comparant avec ce qu’elle possède, en l’occurrence, un vagin. Après cette lecture, je conclus que je connais mieux les attributs de la femme que ceux de l’homme, voilà pourquoi j’aimerais qu’une palette de quinze hommes nous entretienne du vagin, ce tunnel spongieux et extensible. Ceux qui me connaissent savent que j’ai habituellement peu d’attrait pour les recueils de nouvelles, Projet P en est un sous un même thème et je l’ai apprécié. L’unité de tons y est certes pour quelque chose pour n’avoir jamais plongé dans le néant de l’indifférence, chacune trouvant la voie vers mon cœur de lectrice. J’ai souri largement, j’ai été touchée, intriguée, marquée. Je me souviens avoir particulièrement aimé les textes de Chloé Varin, Mobig Dick et Le tour des petits pénis de Caroline Allard pour l’humour et la légèreté qui se prêtent bien à ces palabres. Cet opus sans prétention m’a assurément amené à mieux connaître la constitution de la femme, mais une autre question m’interpelle : comment se présenteraient quinze hommes dissertant sur leur pénis? Fort est à parier que certains textes seraient classés XXX, tandis qu’avec quinze femmes, aucun X, même pas un tout petit.

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